En Europe, l’hypersensibilité chimique multiple est très peu connue, aussi bien des malades que des médecins.
Pourtant, c’est une pathologie à part entière qui peut être un vrai handicap au quotidien.
De nombreuses personnes atteintes d’un syndrome d’activation mastocytaire (aussi d’histaminose et de mastocytoses, mais dans une moindre mesure) se trouvent confrontés à des réactions et des signes cliniques en présence d’odeurs et/ou de produits chimiques.
L’allergie aux parfums est un classique associé à nos maladies.
L’hypersensibilité chimique multiple peut aussi l’être (parfois se superposant à l’allergie aux parfums). Mais elle est bien souvent diagnostiquée très tardivement, voire pas du tout.
La cause ? L’absence de tests biologiques reconnus.
Avec cet article, je vous propose un tour d’horizon complet de cette pathologie, pour mieux la comprendre et l’appréhender.
Nous finirons l’article par les témoignages d’Anne (en vidéo), Sylviane (par écrit) et le mien avec des exemples dans la vie du quotidien et le handicap que cela apporte.
SOMMAIRE
– L’hypersensibilité chimique multiple, c’est quoi ?
– Un syndrome récent
– Dans quels substances/produits ?
– Prévalence dans la population
– Qui est touché ?
– Quels sont symptômes de l’hypersensibilité chimique multiple ?
– Quel mécanisme se produit ?
– Et avec les mastocytes ?
– Quelles conséquences au quotidien ?
– Quels outils de diagnostic ?
– Comment traiter un syndrome de sensibilité chimique multiple ?
– Témoignages
L’hypersensibilité chimique multiple, c’est quoi ?
L’hypersensibilité chimique multiple est aussi nommée syndrome de sensibilité chimique multiple ou SCM. En anglais, on parle de MCS (Multiple Chemical Sensitivity).
L’hypersensibilité chimique multiple, tout comme l’hypersensibilité aux champs électromagnétiques, est considérée comme une intolérance environnementale idiopathique (= dont la cause n’est pas connue).
D’ailleurs, un rapport d’expertise de l’Anses de 2018 souligne les analogies de l’hypersensibilité électromagnétique avec le SCM. Le comité d’experts proposait, comme axe de comparaison, les aspects cliniques et éventuellement physiopathologiques.
Le SCM est un trouble chronique caractérisé par de multiples symptômes récurrents non spécifiques, déclenchés lors de l’exposition à des substances chimiques, à de faibles concentrations tolérées par la majorité des gens et bien inférieures à celles connues pour provoquer des effets toxiques.
La sensibilité aux produits chimiques des patients atteints de SCM est d’environ 1.000 fois plus importante que chez les personnes non atteintes.
L’intolérance peut se déclencher par contact avec la peau, par inhalation ou par ingestion.
Le SCM n’est pas une allergie car le SCM n’est pas médié par les immunoglobulines comme dans une allergie. A ce titre, les traitements utilisés pour les allergies ne fonctionnent pas pour traiter le SCM.
De plus, on pense souvent que c’est une réaction aux odeurs. Mais c’est une réaction aux produits chimiques. Des réactions peuvent donc apparaître même s’il n’y a pas d’odeur. D’ailleurs, les personnes sans odorat peuvent aussi souffrir de SCM.
Pour la p'tite histoire
C’est l’allergologue américain Theron G. Randolph (l’un des pères de la médecine environnementale) qui a été le premier à parler du SCM au début des années 1950. Il l’a décrit comme étant une maladie environnementale avec une perte de tolérance aux produits chimiques notamment avec une sensibilité aux solvants, aux effluves de pétrole ou aux poussières de charbon.
Toutefois, ce n’est que dans les années 1970 que le « syndrome de sensibilité chimique multiple » en tant que diagnostic médical particulier est décrit.
Enfin, c’est en 1987 que le nom que l’on connaît aujourd’hui est donné par M.R. Cullen : MCS (Multiple Chimical Sensitivity). Cullen définit cette pathologie comme une affection acquise, caractérisée par la répétition de symptômes touchant de multiples organes survenant lors de l’exposition à diverses substances chimiques à des concentrations bien inférieures à celles connues pour entraîner des effets dans la population générale.
Le Canada est le pays ayant le plus évolué sur ce syndrome.
A ce titre, en 1985, le gouvernement de l’Ontario nomme un juge pour présider un comité chargé de faire le point sur l’état des savoirs scientifiques sur le sujet et de faire des recommandations pour favoriser la recherche (cela donnera lieu en 1994 notamment au financement de l’unité de
recherche sur l’hypersensibilité environnementale de l’Université de Toronto).
Les États-Unis ne sont pas en reste non plus avec le Pr Martin Pall, biochimiste américain à l’université de Washington State, qui a étudié le SCM depuis de nombreuses années. Le Dr Claudia Miller a aussi developpé le questionnaire QEESI dont nous parlerons plus bas.
Au cours de la dernière décennie, des associations de malades ont vu le jour un peu partout en Europe, en Amérique du Nord, au Japon et en Australie.
Un syndrome récent
Vous l’aurez compris, le SCM est une pathologie très récente dans l’histoire de la médecine, avec encore beaucoup d’inconnues.
Les années 2000 ont vues des avancées importantes en neurosciences et au niveau de l’imagerie cérébrale fonctionnelle. Cela a permis d’apporter de nouveaux éléments permettant de mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques du SCM.
Depuis 2000, l’hypersensibilité est dans le classement international de l’OMS des maladies CIM10 au chapitre 19T 78-4 (hypersensibilité, idiosyncrasie) comme « une affection acquise caractérisée par la répétition de symptômes touchant de multiples organes qui surviennent lors de l’exposition à diverses substances chimiques à des concentrations bien inférieures à celles connues pour entraîner les effets sur la population », mais sans être encore reconnue officiellement comme une maladie à part entière.
Certains pays ont aussi fait des avancées dans la reconnaissance de ce syndrome. Par exemple, au Canada, le SCM est un handicap reconnu en vertu de la loi canadienne sur les droits de la personne.
Par contre, dans d’autres pays comme la France, la maladie est encore presque inconnue. Cela vient du fait qu’il n’existe encore aucune preuve biologique objective pour en faire le diagnostic. Les malades restent alors avec un diagnostic erroné de trouble psychologique.
Dans quels substances/produits ?
Les molécules à l’origine des symptômes peuvent se retrouver dans de nombreux produits.
Citons par exemple :
– les additifs alimentaires,
– les produits de nettoyage et les détergents (liquide vaisselle, produits WC…)
– les cosmétiques et produits de soin (déodorants, crèmes à raser, savons, crèmes, shampoings…),
– les rafraîchisseurs d’ambiance,
– la lessive,
– les parfums,
– le tabac,
– les pesticides,
– les carburants,
– les solvants organiques (à base de carbone, par exemple les photocopieurs lasers),
– les matériaux de rénovation et de construction,
– les peintures,
– les tapis et moquettes,
– les vêtements neufs,
– les moisissures.
Dans le rapport de l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), en pages 45 à 54, vous trouverez une liste complète de composés pouvant engendrer des réactions.
Prévalence dans la population
Les chiffres varient suivant les pays.
Parmi les pays les plus avancés sur le sujet, on peut citer les chiffres :
– du Canada (selon un rapport paru en juin 2021 ayant compilé plus de 4 000 articles) : la prévalence dans la population varie de 0,5 à 3 % quand le SCM est diagnostiqué par un médecin. Si le syndrome est auto-déclaré, ce chiffre peut varier de 7,5 à 32%.
– des États-Unis : 3,5% de la population serait atteinte d’une forme sévère et 12% à 25% serait modérément affectée.
En France, il n’existe pas de chiffres officiels sur la prévalence du SCM.
Du fait que le SCM est une pathologie émergente et encore peu connue, le nombre de cas diagnostiqués est en constante augmentation.
Qui est touché ?
Le SCM peut toucher toutes les populations sans distinction d’âge ou de classe socio-professionnelles.
Il est à constater tout de même que les femmes sont plus impactées que les hommes (notamment en raison des hormones qu’elles sécrètent).
Les personnes avec un SCM ont un risque plus élevé de développer d’autres maladies auto-immunes (lupus, polyarthrite rhumatoïde, sclérose en plaques…).
Quels sont symptômes de l’hypersensibilité chimique multiple ?
Les symptômes apparaissent et disparaissent en fonction des expositions aux produits.
Les symptômes varient d’une personne à l’autre. Il est donc difficile de comparer 2 personnes. Toutefois, les symptômes restent assez constants pour une même personne d’une fois à l’autre.
Les manifestations peuvent être multiples et concernent bien souvent plusieurs sphères chez une même personne :
– respiratoire : dyspnée, toux, oppression thoracique, brûlures respiratoires
– ophtalmologique : picotements, brûlures oculaires
– ORL : picotements nasaux, brûlures laryngées
– neurologique : céphalées, vertiges, fatigue, étourdissement, perte de mémoire et/ou de concentration, faiblesse généralisée
– dermatologique : prurit, démangeaisons
– sensorielle : perception accrue ou anormale des odeurs, troubles visuels
– psychiatrique : dépression, anxiété, irritabilité, insomnies
– rhumatologique : arthralgie, myalgie, douleurs musculaires et articulaires
– cardiovasculaire : palpitations
– digestive : nausées, vomissements, diarrhées, douleurs abdominales.
La gravité des symptômes peut varier suivant 4 stades en fonction du type d’exposition.
– stade 0 « tolérance » : capacité de s’adapter à l’environnement tant que les niveaux dangereux de polluants ne sont pas atteints.
– stade 1 « sensibilisation » : exposition chronique à de faibles doses (ou à des expositions ponctuelles fortes) provoquant l’apparition de troubles précis (sensibilité accrue aux odeurs, asthénie, nausées, céphalées, rougeurs…).
– stade 2 « inflammation » : exposition continue créant des troubles chroniques dus à l’inflammation d’un ou plusieurs organes. Les symptômes peuvent persister plusieurs jours voire plusieurs semaines après l’exposition.
– stade 3 « dégradation » : endommagement des organes vitaux dû à l’inflammation chronique et apparition de troubles auto-immuns, de syndromes neurodégénératifs…
Quel mécanisme se produit ?
L’apparition du SCM va d’abord commencer par une phase de sensibilisation lors d’une exposition à un ou plusieurs produits chimiques. Il peut s’agir :
– d’une seule et très forte exposition à une substance (exposition aigüe),
– ou d’expositions répétées à de faibles concentrations de plusieurs substances (exposition chronique).
Les symptômes vont ensuite s’aggraver et l’organisme va réagir à des concentrations de plus en plus faibles et de plus en plus nombreuses. Certaines de ces expositions n’ont parfois rien à voir avec celles responsables de la sensibilisation initiale.
Je vous avais déjà parlé de ce processus dans l’article sur les allergies aux parfums.
À l’heure actuelle, il n’existe pas de mécanisme physiopathologique reconnu. De nombreuses équipes scientifiques s’y sont intéressées et plusieurs hypothèses explicatives ont été proposées : immunologique, neurologique, métabolique, psychologique et socioculturelle.
Ce sont finalement les origines neurologiques et immunitaires qui prévaudraient.
En effet, les produits chimiques déclencheraient une hyper-excitation de l’hypothalamus et du système olfacto-limbique (voie entre le nez et le cerveau émotionnel).
Les expositions à ces produits peuvent aussi affecter les zones du cerveau responsables de l’humeur, de la concentration et de la mémoire.
De plus, les toxines extérieures modifieraient les seuils de tolérance du système immunitaire. Des expositions répétées aux substances chimiques déclenchent la production de cytokines pro-inflammatoires, à l’origine des symptômes.
Enfin, ces toxines peuvent saturer la capacité de désintoxication en altérant les voies métaboliques et en conduisant à une accumulation de toxines dans l’organisme.
Et avec les mastocytes?
Selon le Pr Matin Pall, spécialiste des maladies environnementales, l’inflammation neurogène et l’activation des mastocytes jouent un rôle important, puisque ceux-ci libèrent, lors de leur activation, des cytokines pro-inflammatoires et de l’histamine.
Selon une étude très intéressante de 2021 publiée notamment par Claudia Miller, plus de la moitié (59%) des personnes de l’étude présentant un SAMA répondaient aussi aux critères de l’intolérance chimique.
Cela illustre le fait qu’à mesure que la probabilité que les patients aient un SAMA augmente, leur probabilité d’avoir une intolérance chimique augmente de la même manière. Ainsi, une personne avec un SAMA a jusqu’à 6,2 fois plus de probabilité de développer une intolérance chimique.
Les schémas de symptômes et d’intolérance étaient presque identiques (entre SAMA et SCM).
Cela soutient la thèse selon laquelle l’activation des mastocytes (induite notamment par la libération de médiateurs chimiques) est un mécanisme biologique plausible pour le développement du SCM.
Le fait de ne pas éliminer ou réduire les déclencheurs (l’étude parle notamment des pesticides et des moisissures) peut entraîner une maladie chronique chez les personnes sensibles, suggérant des dégranulation persistantes.
Quelles conséquences au quotidien ?
Suivant le degré des réactions, la qualité de vie des personnes atteintes de SCM peut être grandement atteinte avec, par exemple, la perte du travail ou encore une perte des interactions sociales.
Ces personnes sont parfois même dans l’incapacité d’approcher des personnes portant des traces de shampoing, de gel douche, de produits cosmétiques ou de lessive.
Pour les cas les plus extrêmes, il y a même une impossibilité de se rendre dans les lieux publics (grandes surfaces, magasins, banques, mairies…) en raison de trop fortes agressions chimiques.
Cela suppose alors des aménagements et des contraintes au quotidien, aussi bien pour les malades que pour leur entourage.
Quels outils de diagnostic ?
A ce jour, il n’existe aucun marqueur biologique spécifique permettant de diagnostiquer ce syndrome.
La difficulté réside aussi dans le fait qu’il n’y a pas de signe clinique spécifique à cette pathologie. En effet, les symptômes présents peuvent aussi être ceux d’autres maladies.
Dans certains pays comme le Canada ou les États-Unis, les connaissances sont plus abouties. Par contre, dans des pays comme la France où la pathologie est peu connue, le diagnostic peut prendre plusieurs années avec des malades en errance médicale.
Le médecin doit d’abord procéder par élimination afin de lever le doute sur d’autres pathologies.
Le diagnostic repose ensuite sur des données cliniques en fonction des symptômes et des antécédents d’exposition aux produits chimiques.
En 1999, un consensus européen a fixé 6 critères cliniques majeurs pour diagnostiquer le SCM :
1) Les symptômes sont chroniques (plus de 6 mois).
2) Les symptômes sont non spécifiques et touchent plusieurs sphères (ex : respiratoire, cutanée…)
3) Les symptômes s’atténuent ou disparaissent en l’absence d’exposition.
4) Les symptômes sont reproductibles avec l’exposition répétées aux substances chimiques.
5) Les symptômes sont déclenchés par des expositions de faibles niveaux.
6) Les symptômes apparaissent avec des substances chimiques n’ayant pas de liens entre elles.
A cette même période, les médecins se sont accordés sur la mise en place d’un nouveau questionnaire dont le but est de faciliter le diagnostic.
Le Quick Environnemental Exposure Sensitivity Inventory (QEESI) est un auto-questionnaire d’évaluation du SCM.
Ce questionnaire a été développé et validé aux États- Unis ainsi qu’au Japon, au Danemark, en Suède et en Espagne au départ. Il est devenu la référence mondiale en matière d’évaluation de l’intolérance chimique.
Pour vous soutenir
Des associations sont là pour vous aider et vous soutenir.
Par exemple :
SOS MCS ou France MCS.
En France, les Centres Régionaux de Pathologies Professionnelles et Environnementales (CRPPE) peuvent vous aider.
Comment traiter un syndrome de sensibilité chimique multiple ?
A ce jour, il n’existe pas de traitement pour guérir d’un SCM.
La préconisation la plus importante est une suppression stricte des sources chimiques déclenchant les symptômes, en particulier dans le quotidien.
A l’intérieur de la maison, il est alors important de supprimer et changer toutes les sources pouvant provoquer des réactions. Il convient d’éliminer les produits d’entretien nocifs, les peintures les plus toxiques et faire attention aux types de vêtements, aux produits d’hygiène ou de maquillage.
Des purificateurs d’air avec un filtre HEPA peuvent être installés.
A l’extérieur de la maison, dans les bâtiments publics (les plus exposés aux rafraîchisseurs d’air et produits de nettoyage), il est préférable de se couvrir la peau pour empêcher l’absorption et de porter un masque pour éviter l’inhalation.
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Témoignages
Anne B., 54 ans (Peseux, Suisse)
Anne apporte son témoignage au travers de cette petite vidéo de quelques minutes.
Sylviane B., 48 ans (Villers-la-Ville, Belgique)
– Peux-tu nous dire de quelles pathologies tu es atteinte (en plus du SCM) ?
On m’a diagnostiqué un SAMA en juin dernier, avec ce qui semble également être une mastocytose cutanée, bien que je n’aie pas les symptômes types. Je suis également porteuse d’une alpha-tryptasémie héréditaire (HαT). Pour moi, le SCM est indissociable de ces maladies mastocytaires.
Le système est arrivé à un point d’hypersensibilité où tout devient potentiellement un risque, un catalyseur de déclenchement de réaction.
Je n’étais pas comme ça avant. J’ai travaillé plus de 20 ans pour Médecins Sans Frontières. Je mangeais, buvais, voyageais et respirait plus ou moins tout ce que je voulais. J’ai toujours eu un système alerte et sensible, mais cela ne me rendait pas malade comme maintenant. Depuis un an et demi, les choses ont basculé pour des raisons qui demeurent encore floues pour moi, mais que j’attribue à une combinaison de facteurs : plusieurs infections virales, parasitaires, ainsi qu’un SIBO (à la source de dysbioses, invoquées dans certaines littératures), une période compliquée au niveau personnel, et le début de la pré-ménopause.
Ces éléments sont venus s’inscrire dans un contexte sous-jacent propice, à savoir le fait d’avoir une HαT, ce dont je n’étais pas au courant jusqu’il y a peu.
– Comment se manifeste chez toi l’hypersensibilité chimique multiple ? A quels produits réagis-tu et quels sont les symptômes associés ?
Depuis environ un an et demi, je ne tolère plus les odeurs, parfums et émanations chimiques, quelles qu’elles soient.
Concrètement, traverser des allées de produits ménagers, être dans des lieux avec des parfums d’ambiance, faire un plein d’essence, inhaler les gaz d’échappement de véhicules en pleine rue ou même rouler à travers un tunnel, être avec des amis qui ont mis du parfum, sentir les émanations de cuisine ou profiter de jolies fleurs odorantes sont devenus un réel problème.
Je réagis en général dans les secondes ou les minutes qui suivent, avec une série de symptômes (malaises, étourdissements, douleurs thoraciques, contractions musculaires, nausées, fatigue, etc). L’effet peut parfois perdurer pendant plusieurs jours.
– En quoi cette hypersensibilité handicape-t-elle ton quotidien ? Dois-tu faire des aménagements dans ta vie par rapport au SCM ?
C’est très handicapant. Je ne peux plus avoir la vie personnelle, sociale et professionnelle que j’avais. Même conduire est devenu risqué, sans parler de voyager ou être dans un endroit dénué de structures de santé au cas où j’atteins un seuil critique, ce qui est désormais malheureusement de plus en plus le cas.
Je porte très souvent un masque, et tous les produits ménagers et personnels ont dû être adaptés. Allumer l’air conditionné dans la voiture ou les sièges chauffants me font réagir, de par le dégazage des nombreux produits et solvants industriels qu’ils contiennent. Faire une démarche aussi simple que d’aller chez le dentiste est compliqué : on doit envisager au préalable quels produits médicaux vont pouvoir être utilisés (l’intolérance aux médicaments mais aussi excipients ainsi que nombreux aliments sont un gros souci dans les maladies mastocytaires), et aussi m’assurer que je ne vais pas réagir de trop aux produits ambiants (gel hydroalcoolique, désinfectants, etc).
À part l’éviction, je cherche désormais tous azimuts les meilleures approches thérapeutiques qui font leur preuve dans ce domaine, notamment la technique DNRS, mais le manque de reconnaissance de ce syndrome et de recherche et outils est flagrant.
– Cela a-t-il aussi un impact sur ton entourage ?
Oui, mon entourage est grandement impacté. Ma famille et mes amis font du mieux qu’ils peuvent pour comprendre ma maladie, et pour me préserver, mais ce n’est pas toujours simple. Pas plus tard que la semaine passée, une amie proche nous avait invités à dîner. Au moment de rentrer dans la maison, je vois une dizaine de jolies bougies d’ambiance parfumées allumées… J’ai réagi instantanément. Pareil avec mon père âgé qui faisait un bout de vaisselle avec son détergent alors que j’étais dans la pièce adjacente, ou lorsque ma sœur m’a étreinte récemment avec plein de tendresse mais aussi un adoucissant pour lessive qui ne passait pas du tout pour mon système.
Mais le plus compliqué, c’est pour mon conjoint. C’est indubitablement lui qui en pâtit le plus. Cela demande beaucoup de patience, de compréhension et d’amour d’être constamment présent aux côtés d’une personne nouvellement malade, de me soutenir à travers ces épisodes de crise et de naviguer dans le complexe océan des questions et errances thérapeutiques. C’est angoissant et drainant émotionnellement. On parle peu de cette question de l’entourage, et pourtant elle est primordiale.
Marie d’Histalive, 43 ans (Annecy, France)
Une fois n’est pas coutume, je donne mon témoignage dans un article.
Oui, car avec un SAMA, j’ai aussi, entre autres, une allergie aux parfums et une hypersensibilité chimique multiple. Je tenais simplement à vous faire part d’un exemple par rapport à cette hypersensibilité, afin d’illustrer le fait que ce ne sont pas les odeurs en cause mais bien la substance chimique.
Il y a quelques années, dans mon ancien appartement, j’ai voulu refaire 2 petites parties d’un mur avec de l’enduit/crépi.
Sachant que j’avais une allergie aux parfums, au magasin de bricolage, j’ai passé beaucoup de temps à choisir un crépi « sans odeur ». Je pensais que cela suffirait à ne pas me faire réagir.
J’ai fait une première application sur un des deux murs. Le lendemain, mon état était catastrophique : nausées, fatigue extrême, douleurs musculaires, maux de tête. Et j’en passe. Je n’ai absolument pas relié cela au crépi. J’ai mis plus d’une semaine à aller mieux.
Quinze jours plus tard, j’ai enduit le 2ème mur. Et là, de nouveau de nombreux symptômes le lendemain, d’autant que je n’étais pas totalement remise de la première fois.
C’est seulement à ce moment-là que j’ai fait un rapprochement entre le crépi et mes symptômes.
Donc, même si le crépi était sans odeur, celui-ci a tout de même provoqué des symptômes car c’est bien le produit chimique en lui-même qui est en cause.
A lire aussi dans la rubrique “Conséquences associées”…
– Environmental Science Europe : « Mast cell activation may explain many cases of chemical intolerance »
– Pr Marin Pall : « Syndrome d’hypersensibilité chimique multiple (MCS) : Mécanismes toxicologiques et d’hypersensibilité »
– Institut National de Santé publique du Québec : Article 1, Article 2, Article 3
– Association Santé Environnement France
– Science Direct : « Physiopathologie du syndrome d’hypersensibilité chimique multiple »
– Littérature scientifique en santé : « Physiopathologie du syndrome d’hypersensibilité chimique multiple »
– Mon système immunitaire : « Mieux comprendre l’hypersensibilité chimique multiple »
– Association pour la santé environnementale au Québec (ASEQ) : « Sensibilité chimique multiple »
– HAL : « L’invisibilité du syndrome d’hypersensibilité chimique multiple »
– HAL : « Étude de la fiabilité de la version française du QEESI » de Thomas Gonzalez
– France MCS : « Le syndrome MCS expliqué »
– SOS MCS : « Qu’est-ce que la SCM (MCS en anglais) ? »
– ANSES : « Syndrome de sensibilité chimique multiple (SCM). Description des cas enregistrés dans le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P) entre 2001 et 2021 »
– National Library of Medicine : « Case Definitions for Multiple Chemical Sensitivity »
– National Library of Medicine : « Three questions for identifying chemically intolerant individuals in clinical and epidemiological populations »
– Académie suisse des thérapies naturelles : « Les allergènes et l’hypersensibilité Chimique Multiple »
– Allergies Protech : « Qu’est-ce que la sensibilité chimique multiple ? »
– Parlement européen : « Code de diagnostic pour le syndrome de sensibilité chimique multiple »
– ANSES, rapport révisé en 2023 sur lien entre SCM et l’hypersensibilité électromagnétique
– All Natura : « Hypersensibilité chimique multiple »
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